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Voile de compétition : l’horizon de la course au large abordé en conférences8 min de lecture

Dans le cadre de son programme Eurolarge Innovation, BDI a profité de la Route du Rhum 2022 pour réunir acteurs et amateurs de la voile de compétition lors d’une conférence intitulée “Entre euphorie et marchés sous tensions, quelles perspectives pour la course au large ?”. Les quatre tables rondes ont permis de dégager des pistes de réflexion pour l’avenir de la filière sur les sujets de l’environnement, du recrutement ou de l’attractivité.

 

Quelle attractivité pour la course au large de demain ?

Réunis autour de cette première table ronde, Pierre-Yves Leroux, journaliste à RMC Sport, Hervé Favre, président d’OC Sport, Yannick Perrigot, directeur général de l’agence Disobey, et Antoine Robin, codirecteur général de la Transat Jacques Vabre, se sont accordés sur un point : la course au large est plus attractive que jamais. La Route du Rhum 2022 en est la preuve. 138 navires au départ, des partenaires toujours plus nombreux et des retombées médiatiques “déjà équivalentes à celles recensées à l’issue de l’édition 2018” selon Yannick Perrigot. 

 

Un constat cependant nuancé par Pierre-Yves Leroux, confronté, parfois, à la réticence de sa rédaction pour traiter la voile. “Par rapport à d’autres sports et disciplines, la voile doit en permanence convaincre”, a tempéré le journaliste de RMC. Comment ? “En exploitant le story-telling autour des courses au large, en faisant rêver”, avance Hervé Favre, dont l’entreprise organise la Route du Rhum. “Les gens gardent à l’esprit les images de Jean Le Cam sur le Vendée Globe 2020, illustre Pierre-Yves Leroux. La voile doit rester un sport avec des histoires racontées par les skippers.” Selon Yannick Perrigot, “l’attractivité future de la course au large passe par plus d’argent investi dans la manière de montrer, de partager, de faire découvrir”.

 

Pour l’avenir, un vent d’optimisme a soufflé lors de cette table ronde. La voile pouvant compter sur de nombreux atouts pour attirer des partenaires dans le futur.

 

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Futur de la course au large, la vision des classes

Cette table ronde a permis de dresser le panorama de quatre classes présentes sur cette Route du Rhum 2022. Amélie Grassi, présidente de la Classe Mini, Halvard Mabire, président de la Class40, Antoine Mermod, en charge des IMOCA, et Thibaut Vauchel-Camus, vice-président de la classe Ocean Fifty, ont tous souligné la forte croissance de leur catégorie.

 

Du côté de la Classe Mini, on s’est dit “un peu en saturation”. Afin de permettre au maximum de candidats de faire au moins deux courses par an, ses équipes ont mis en place un système imitant Parcours Sup. La classe Ocean Fifty a elle instauré un numerus clausus de 10 navires avec possibilité de l’augmenter à 12. « Nous avons voulu maîtriser la flotte pour que les projets aient accès aux courses qu’ils vont vendre à leurs partenaires, pour donner une longévité sportive et technique aux bateaux, mais aussi pour qu’ils entrent au cœur des villes », a justifié Thibaut Vauchel-Camus.

 

Chacun des intervenants a ensuite exposé ses attentes pour l’avenir. “Mixité, internationalisation et environnement” sont au cœur des attentes de la Classe Mini. La classe Ocean Fifty escompte « créer un équilibre entre les grands événements et le reste de la saison, ne pas être dépendant de mastodontes de la course au large ». Halvard Mabire espère “lancer de grandes courses spécifiques à la Class40”. Enfin Antoine Mermod a souligné “la nécessité de trouver des marchés plus grands pour amortir les investissements” pour les IMOCA. 

 

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Pénurie de main d’œuvre, coûts des matières premières, inflation… : comment gérer la croissance en période d’incertitude ?

Malgré sa belle santé, la voile de compétition est aussi impactée par la conjoncture actuelle. Elle est notamment confrontée à une problématique d’attraction des candidats et surtout subit l’inflation du coût des matières premières. Respectivement directeurs généraaux de CDK Technologies, Mutliplast, NKE Marine Electronics et du groupe Incidence, Cyril Abiteboul, Yann Penfornis, Alain Boschet et Matthias de Christen ont ainsi partagé leurs points de vue et leurs solutions.  

 

Multiplast a lancé, en 2015, son propre centre de formation en partenariat avec l’AFPA. “Ce système nous constitue un petit vivier afin de compenser les départs”, explique Yann Penfornis son directeur général. Chez CDK Technologies, on survalorise les heures supplémentaires. “L’initiative commence à porter ses fruits. Les salariés effectuent plus d’heures supplémentaires qu’auparavant”, convient Cyril Abiteboul, qui a officialisé le projet de rachat de C3 Technologies, basée à La Rochelle afin de mettre en commun les volumes et enclencher une diversification plus étendue de ses marchés. Le groupe Incidence, lui, “fait feu de tout bois”. Matthias de Christen explique ainsi “se tourner vers les missions locales, s’ouvrir à des profils différents de ceux que l’on a pu avoir par le passé”. 

 

Au sujet de la montée en flèche des coûts des matières premières, chacun se dit touché par la situation actuelle. “La marge s’est un peu évaporée avec l’augmentation des prix”, témoigne Yann Penfornis.  “Nous sommes vigilants pour le futur, reconnaît Cyril Abiteboul. Nous faisons avec les contrats tels qu’ils sont aujourd’hui.” Pour Matthias de Christen, “la production de navires est une gageure, avec le déficit de main d’œuvre et la pénurie de matières premières. Heureusement, l’écosystème est solide.”

 

Les participants ont enfin partagé leur vision pour le futur. Yann Penfornis a notamment soulevé la question de décarbonation du transport maritime d’ici à 2030, notamment par la propulsion des navires par le vent. “Nous sommes challengés sur de bonnes solutions.” Et Matthias de Christen d’abonder :  “ce sujet est un vrai relais de croissance pour amortir un atterrissage de la voile de compétition assez inéluctable. Il est nécessaire d’investir dans la recherche et le développement.”

 

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La voile de compétition va-t-elle vraiment passer au développement durable ?

La voile de compétition véhicule l’image d’une discipline en phase avec les éléments naturels. Arthur Le Vaillant, skipper et membre du collectif La Vague, Stéphane Bourrut Lacouture, responsable RSE d’OC Sport, Damian Foxall, responsable du programme de développement durable de l’écurie américaine 11th Hour Racing, et Clarisse Lelong, associée du cabinet Deloitte Sustainability France, ont ainsi questionné le rôle de la filière sur les enjeux RSE.

 

Arthur Le Vaillant est revenu sur la tribune qu’il a co-signée avec les membres de La Vague et d’autres acteurs de la course au large. “La courbe n’est pas bonne. Organisateurs, fédérations, industriels, classes, doivent planifier une démarche de courage et essayer d’agir tous les jours sur différents sujets.” Clarisse Lelong explique ainsi que “le sport de haut niveau doit se réinventer et a un devoir d’exemplarité de par son exposition médiatique”. Le team de Damian Foxall a ainsi réalisé une étude sur 11th Hour et sur les caps à privilégier pour l’avenir, avec trois mots d’ordre “moins, mieux et alternatif”.

 

Cette remise en question de la voile doit-elle passer par un changement des règles dans la voile de compétition et la course au large ? Damian Foxall a proposé l’idée “d’inscrire le développement durable dans les règlements”. Arthur Le Vaillant a prolongé le raisonnement : « À l’avenir, pour gagner, le but pourrait-être de ne plus seulement être le plus rapide, mais aussi le moins impactant”. Stéphane Bourrut Lacouture a quant à lui insisté sur “la pédagogie et la communication”, afin d’accélérer le changement de cap de la filière vers le développement durable.

 

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