Interview

Une étude révèle le poids de la voile de compétition en Bretagne6 min de lecture

Elle est intitulée « L’économie de la voile de compétition (industrie, commerce et services) » et comme son nom l’indique ce travail mené depuis plusieurs mois dessine les contours d’une filière déjà dynamique mais qui peut encore se développer. Carole Bourlon, responsable du cluster Eurolarge porté par Bretagne Développement Innovation nous décrypte les enjeux et les perspectives engendrées par ce travail, réalisé à la demande du cluster et mené en collaboration avec plusieurs partenaires et les équipes du pôle ingénierie de Bretagne Développement Innovation.

© Dominique Leroux

Quel est son but ?

Les dernières études réalisées à l’échelle régionale datent de 2010 et n’avaient pas été actualisées. Or, beaucoup de choses se sont passées depuis. Certaines études existent sur le sujet, sans couvrir l’ensemble du territoire régional. La filière voile de compétition a été fortement marquée par des cycles d’innovation dernièrement. Ces innovations ont impacté le comportement et la stratégie de développement des entreprises. Eurolarge Innovation, cluster mandaté par la Région Bretagne à travers Bretagne Développement Innovation, se doit de mettre à jour ces données pour bâtir une stratégie à moyen et long terme.

Quel est le périmètre de cette étude ?

Elle se concentre sur les entreprises de l’industrie, du commerce et des services. En clair, toutes celles intervenant dans la création d’un bateau, de sa conception à sa mise à l’eau. Cela inclut les phases de design, d’architecture navale, de calcul de structure, d’architecture, de construction, de pose d’équipements et de tous les services que l’on trouve en aval, après-vente. Le but était donc de bien détourer cet aspect de la filière voile de compétition. A court terme, nous allons réaliser une étude plus précise de l’économie des teams de course et des coureurs, et tout ce qui concerne le sponsoring. Nous voulons mieux comprendre et mieux connaître ces aspects.

Quelques mots sur la méthode de travail…

Nous nous sommes entourés d’acteurs qui avaient déjà participé à la précédente étude sur le nautisme. Je pense à Quimper Cornouailles Développement, Lorient Technopôle, le Conseil départemental du Morbihan et également Finistère 360. Ils ont apporté supports et connaissances. Nous avions à cœur de rendre une étude complète et pertinente. Au-delà des données économiques, nous souhaitions avoir des éléments pour orienter nos plans d’action, notamment sur deux aspects : celui de l’innovation et du développement à l’international.
Il s’agissait aussi de permettre de faire de la prospective car nous sommes un marché en rupture technologique avec l’arrivée des foils et le développement du numérique. Quels que soient les sujets d’actualité, nous voulions savoir de quelle façon tous ces éléments viennent impacter la filière.

 

© Dominique Leroux

Y avait-il une attente parmi vos adhérents d’avoir une vision d’ensemble de la filière ?

Aucune demande particulière n’existait auprès des adhérents. Les résultats montrent comment ils ont réussi à bâtir une filière qui est un exemple mondial. En effet, la filière voile de compétition, telle qu’elle a été créée en Bretagne, est unique au monde. Les acteurs économiques bretons peuvent être très fiers du travail qu’ils ont accompli ensemble, dans un esprit collaboratif. Le cluster Eurolarge Innovation en est un bel exemple.

Les adhérents doivent aussi s’emparer de cette étude…

 

Oui, absolument. Elle leur servira surtout à l’international. Rappelons que nous sommes actuellement au Yacht Racing Forum et que la Bretagne accueillera l’édition 2018 à Lorient. Il est important de montrer ce que savent faire nos entreprises, dans un esprit de conquête et de rayonnement. Nous avons des poids lourds, des entreprises qui sont conséquentes mais également un nombre important de petites entreprises (avec une moyenne de 8 salariés). Ces dernières éprouvent le besoin de se réunir sous une bannière plus conséquente. On a coutume de dire « Les petits ruisseaux font les grandes rivières ». Pour moi, toutes ces TPE qui agissent sur un marché de niche peuvent se réunir avec de plus grandes.

Quels sont les principaux chiffres marquants concernant la filière ?

 

La filière regroupe plus de 160 entreprises. Elles totalisent un CA de 205 millions d’Euros dont 60 millions réalisés dans la voile de compétition. On note que 1550 salariés participent à la filière, parmi lesquels 700 emplois sont directement liés à l’activité voile de compétition. Ce chiffre d’affaires significatif connaît une progression de 9 % entre 2015 et 2016 !

Autre point intéressant : les entreprises dont on parle investissent beaucoup dans l’innovation. On voit qu’il y a, en cumulé, 5,5 millions d’euros d’investissement dans la R&D consacrée à la voile de compétition…Toutes ces sociétés sont présentes à l’international, surtout sur les zones européennes. Un effort reste à faire sur le grand export et la pénétration dans des pays anglo-saxons, comme les Etats-Unis ou la Nouvelle-Zélande, marchés importants pour la voile de compétition. Nos entreprises doivent se positionner de façon plus importante. Elles pourraient être plus présentes sur certaines séries ; et des progressions peuvent être faites sur le circuit olympique et la Coupe de l’America.

Le 3e et dernier objectif de l’étude était « d’étudier des leviers de développement de la filière ». Quels sont-ils ?

 

Pour évoquer les leviers de développement, je commencerai par l’internationalisation. On a posé un premier plan d’action avec cette délégation d’entreprises au Yacht Racing Forum 2017, à Aarhus au Danemark. En 2018, nous accueillerons la manifestation. Les entreprises pourront ainsi y rencontrer tous les décideurs internationaux : c’est un bon moyen pour se faire connaître dans le milieu international.
Quant au deuxième point, la diversification. L’étude a révélé que beaucoup d’entreprises sont diversifiées dans le nautisme, le naval, les matériaux composite, l’aéronautique, la défense. Certaines d’entre elles commencent à se positionner sur ces secteurs. Leur savoir-faire technologique y est très apprécié, il s’agit donc d’axes de développement importants.

Quelles sont les perspectives pour le secteur et quelles sont les actions à mener pour développer la filière ?

 

De grandes thématiques se dégagent pour les 10 prochaines années : la généralisation des foils et des bateaux volants. Beaucoup de travail va être fait autour de ça. 44 % des personnes ayant participé à l’enquête citent ce point-là comme étant particulièrement important pour l’avenir de la filière. Autre grand sujet d’avenir : l’optimisation de la performance des matériaux et évidemment électronique et numérique qui vont être de plus en plus présents sur les bateaux de compétition.

Consulter le document de synthèse de l’étude en ligne